Le 2 mars dernier, la Commission européenne a autorisé la culture et l’utilisation d’une pomme de terre génétiquement modifiée, l’Amflora commercialisée par l’industriel allemand BASF, ainsi que la mise sur le marché de produits contenant du maïs génétiquement modifié, commercialisé par Monsanto. Cette décision largement contestée révèle une position ambiguë des Etats qui se refusent à prendre la responsabilité politique et sociale d’une telle décision. En l’occurrence, les Etats, le Conseil des ministres et la Commission européenne se sont refiler la patate OGM sans que personne n’assume ses choix!
La législation européenne prévoit qu’aucun OGM ne peut être commercialisé, mis sur le marché ou en culture sans autorisation. Cette autorisation appartient en principe au Conseil des ministres européens, c’est-à-dire aux représentants des Etats, c’est-à-dire aux Etats. Ce n’est qu’en l’absence d’accord entre les 27 que la Commission, c’est-à-dire l’Europe, est contrainte de prendre une décision. Pour se faire, elle cherche l’appui d’expertises scientifiques, comme l’avis de l’Agence européenne de sécurité alimentaire. En l’occurrence, la procédure initiée il y a plus de 10 ans en Suède bénéficie selon la Commission d’une « somme considérable de connaissance scientifiques rigoureuses ».
Mais cette fois, la Commission n’a plus envie d’assumer seule la responsabilité d’une mesure qui divise et soulève tant de polémiques. Rejeter la faute sur « Bruxelles », c’est fini!
En effet, non seulement, la Commission a rappelé dans son communiqué de presse du 2 mars qu’elle n’intervenait que faute d’accord entre les Etats puisque 11 ont voté contre, 10 pour et 6 se sont abstenus dont la France qui aujourd’hui conteste les études et annonce qu’elle fera jouer la clause de sauvegarde. On s’étonne qu’elle ne l’ait pas fait plus tôt alors qu’elle avait un pouvoir d’influence sur la décision européenne. On s’étonne qu’elle ne se soit pas prononcée contre. On s’étonne même qu’elle n’ait pas saisi son instance d’expertise, le Haut Conseil des Biotechnologies, avant pour faire valoir ses arguments.
Mais la Commission ne s’arrête pas là. Elle a annoncé sa décision de présenter d’ici l’été une « proposition visant à laisser aux Etats membres plus de latitude pour décider de cultiver ou non des OGM« . Comprenez: les Etats vont devoir trancher, décider seuls, en tout cas assumer seuls! Cette proposition est exceptionnelle puisque la Commission consent à faire une entorse aux sacro-saintes règles du marché commun pour mettre les Etats face à leur responsabilité.
Heureusement BASF a annoncé, dans un communiqué du 2 mars, qu’elle ne proposera sa pomme de terre qu’aux Etats « déjà prêts à l’utiliser », Suède, Pays-Bas, République Tchèque et Allemagne, et « n’a pas prévu, à ce jour, de la proposer aux industriels français ». BASF tient à prendre en considération les « particularités et les demandes de chaque pays ». Le gouvernement français n’a donc rien à craindre… au pire il reste toujours le Haut conseil des biotechnologie dont l’avis devrait lui faire assumer une part de responsabilité.
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