Plus de 50 morts, des animaux décédés par centaines, 45.000 hectares de terres agricoles inondées et un coût estimé à un milliard d’euros, fatalité ou responsabilité humaine ?
Il n’y a certes pas de responsabilité humaine face aux événements météorologiques et autres catastrophes naturelles, à défaut pour l’homme de pouvoir agir directement sur l’événement. En revanche, il est possible d’agir pour prévenir et minimiser leurs conséquences notamment par une réduction de l’exposition au risque. C’est d’ailleurs ce qu’indique, sur son site, le ministère de l’écologie: « Si les catastrophes naturelles sont inévitables, la politique de prévention vise à réduire leurs conséquences dommageables, en complément de la gestion de crise et de l’indemnisation des victimes : connaître les risques, informer, éduquer, surveiller, prévoir, réduire la vulnérabilité, protéger, se préparer à la crise, exploiter le retour d’expérience et responsabiliser. »
Et ce ne sont pas les outils, juridiques, qui manquent aussi bien pour encadrer l’urbanisation que pour organiser les mesures de précaution et les secours. D’une part de manière non spécifique, le droit de l’urbanisme délimite des zones de constructibilité et peut accorder ou refuser le droit de construire selon que la construction projetée présente des risques pour la salubrité ou la sécurité. Par ailleurs, ce qu’on appelle la police générale accorde des pouvoirs au maire et au préfet pour assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. D’autre part, la réglementation spéciale de prévention et de gestion des risques naturels, au premier rang desquels, le risque inondation, impose la prise en compte de ce risque par les politiques d’urbanisme via un PPRN, plan de prévention des risques naturels, et peut prévoir l’organisation des secours via un PPI, plan particulier d’intervention. Cette réglementation et ces plans sont sous la responsabilité des préfets, c’est-à-dire, de l’Etat.
Malgré ces outils, Xynthia a tué. Où est la faille? A qui la faute? Faut-il réformer?
En ce qui concerne l’organisation des secours, on ne peut que s’interroger sur l’absence de mesures prises avant le drame par les autorités étatiques, le préfet, ou les autorités locales, le maire. Pourquoi malgré une alerte rouge, la seconde depuis la mise en place du système, donnée sept jours auparavant et alors que tous les éléments du drame étaient réunis et connus, pourquoi ni le préfet, ni les maires, ni personne n’a organisé une évacuation ? pourquoi aucune consigne n’a été donnée à la population ? pourquoi aucune sirène n’a retenti pour réveiller ceux que la mer allait prendre dans leur sommeil ?
S’agissant de la construction en zone submersible, là encore on s’interroge sur le non respect des règles et servitudes d’urbanisme. Pression immobilière, intérêts financiers et appât du gain, comme de cette adjointe au maire dont le fils est agent immobilier, ont eu raison de la sécurité des personnes et des biens. Des autorisations d’occupation du sol ont été délivrées par les communes et l’Etat, responsable de la prévention des risques naturels et garant du respect de la légalité par les communes, n’est pas intervenu. Comment, le préfet chargé du contrôle de légalité des actes du maire n’a-t-il pas demandé l’annulation de ces autorisations d’occupation des sols ?
Ce n’est donc pas tant la norme qui est en cause, car elle existe et offre des moyens de protection efficaces, mais l’utilisation, ou l’absence d’utilisation, qui en est faite. La prévention des risques naturels a failli, par la non application des mesures protection, deux fois et à un double niveau. Et c’est cette défaillance humaine qui a causé la mort de 52 personnes.
Bravo pour ces remarques très pertinentes.
Si dans ce cas, effectivement des fautes ont été commises, malheureusement, les situations de catastrophes naturelles ne sont pas toujours aussi simples. Ainsi par exemple, les risques de dégats et de victimes en bord de mer lors de raz de marée importants ou de tsunami, ne peuvent pas toujours contraindre à vivre loin en profondeur des terres.
Merci André.
Il est vrai qu’il n’existe pas de lieu exempt de risque et que cette idée même est illusoire, de même il n’est pas envisageable ni réaliste de modifier du jour au lendemain des configurations urbaines établies. En revanche, notre pays souffre d’un manque dramatique de culture de risque et de mémoire du risque. Ce n’est pas parce qu’on habite en bord de mer, qu’on doit mourir dans sa maison une nuit de tempête et de forte marée !
On sait par exemple que Nice qui se situe non loin d’une faille sismique est soumise à un risque non négligeable de tsunami. Mais tout le monde l’ignore ou préfère penser que ça n’arrivera jamais, ça ne peut arriver qu’en Asie. Et le drame, ce n’est pas que les constructions seront ravagées et la ville en partie détruite, le vrai problème c’est que, faute de culture de risque, on reproduira les mêmes erreurs qu’en Vendée et que ces erreurs se paieront en vies humaines.
Les cataclysmes existent et sont inéluctables, mais leurs conséquences en termes de vies humaines ne sont pas une fatalité! Développer la culture du risque c’est appréhender le risque pour l’accepter et apprendre à la gérer pour limiter ses conséquences. En l’occurrence, tant qu’aucun plan d’évacuation ne sera pensé pour Nice, on doit craindre le pire.