Pendant l’Antiquité, l’homme forme un tout avec son univers ; c’est la théorie du cosmos et de l’ordre naturel aristotélicien. Il est alors logique de considérer l’environnement de l’homme pour appréhender sa santé. Dans sa « Théorie des climats », Hippocrate enjoint au médecin de s’intéresser à l’environnement et au mode de vie du malade. Le thérapeute doit étudier l’exposition aux vents et au soleil, la qualité des eaux et la nature du climat.
Les Romains, quant à eux, développent une politique d’hygiène du milieu particulièrement élaborée, notamment autour de la question de l’eau (médecine de l’eau par la thalassothérapie et systèmes de viaducs pour l’apport d’eau saine et l’évacuation des eaux sales). L’hygiène publique, la salubritas, est au coeur des préoccupations romaines depuis les médecins jusqu’aux architectes qui construisent les citées selon l’orientation des vents et les zones marécageuses.
Au XVIIIe siècle, malgré la scission entre l’homme et la nature, les limites techniques du pouvoir médical et scientifiques justifient encore une action sur le milieu et l’environnement des malades. De plus, la fin de l’emprise du religieux sur les questions de santé va permettre aux pouvoirs publics d’investir pleinement ce champ de la santé des populations.
Le développement des théories hygiénistes qui s’attachent à replacer l’individu dans son environnement et à établir des liens entre maladies et conditions de vie, va permettre de modifier le regard à l’environnement immédiat (ordures, saleté, odeurs). Il va ainsi favoriser l’assainissement des villes comme des campagnes ainsi que de l’habitat pour une amélioration de la santé. Par ailleurs, la naissance de l’épidémiologie va favoriser la connaissance des causes des maladies pour pouvoir élaborer des mesures destinées à prévenir leur apparition.
En 1810, les grandes villes commencent à évacuer les activités les plus polluantes (tanneries, équarissage, etc.) et les cimetières de leur centre. C’est le début de la réglementation des installations classées que l’on connaît toujours aujourd’hui. La salubrité et l’hygiène du milieu qui dominent, conduisent également à l’adoption de la première grande loi de santé publique, la loi du 15 février 1902. Cette loi crée le signalement obligatoire de certaines maladies contagieuses, prescrit un certain nombre de mesures d’hygiène des habitations et de désinfection, instaure un Conseil supérieur de l’hygiène publique et inaugure le règlement sanitaire, communal puis départemental.
Ainsi, à défaut de pouvoir agir sur les hommes et les maladies, les médecins interviennent sur ce qu’ils connaissent et peuvent contrôler, c’est-à-dire le milieu à travers des mesures d’hygiène et de prophylaxie.
Pourtant, à partir des années 1920, la santé publique repasse au second plan devant l’explosion du progrès médical, de l’innovation thérapeutique et de la médecine libérale. Les médecins qui peuvent dorénavant soigner voire sauver et qui sont devenus des notables, commandent la santé et prônent une médecine individuelle très éloignée des préoccupations environnementales.
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